Claudine Favrichon

Une femme de chœur

Par hasard, j'ai trouvé cet article dédié à Claudine Favrichon, publié par Cécile Daniel, le 26 février 2015. Par un legs à la commune, cette cantatrice est à l’origine de la fondation de l'hôpital. Avec la permission de Cécile Daniel, que je remercie vivement, voici des extraits de cet article.

J’ai croisé Claudine Favrichon à l’hôpital

de Grandris, son nom trône en tête de la liste des bienfaiteurs avec la date 1872. Cette enfant du pays

a eu une vie originale et, comme j’aime les belles histoires, j’ai essayé

d’en savoir un peu plus…

Claudine Favrichon est née à Grandris au lieu-dit Gondras, le 24 septembre 1812. Fille de Jean Marie Favrichon et de Françoise Farge, elle est la troisième

d’une fratrie de six enfants. Sur les actes de naissance des enfants, son père est déclaré propriétaire. Claudine a 6 ans quand son père décède, à l’âge de 52 ans,

le 18 décembre 1818. J’imagine que ce décès fait suite à une maladie ou à une blessure car, quelques jours avant son décès, le 3 décembre 1818, Jean Marie Favrichon épouse Françoise Farge, sa compagne, mère de ses enfants.

Le couple vivait en union libre, Jean Marie devait avoir à cœur de régulariser

la situation pour ses enfants et sa future veuve. Au décès du père, la famille

est composée de Claudine, ses deux frères âgés de 9 ans et 3 ans, sa grande sœur de 8 ans et deux enfants du premier mariage de son père.


La légende raconte que Claudine est partie travailler à Lyon comme domestique dans une famille bourgeoise. J’ai essayé de trouver une trace

de son séjour aux archives de la Ville, dans les archives des bureaux de placement

ou du contrôle des ouvriers. Sans succès. Ce type d’archives n’existe pas pour

les années 1820 ! Quant au premier recensement de la ville de Lyon, il date de 1836. Claudine Favrichon avait 24 ans. Je ne suis pas sûre qu’elle était encore à Lyon

à cette date. La légende prétend que la famille qui l’employait, séduite par sa belle voix, lui a permis de prendre des cours de chant et ainsi de devenir cantatrice.


Je l’ai retrouvé à Rio de Janeiro, au Brésil, où elle arrive en 1852. Son nom apparaît dans un essai de Charles Expilly publié en 1863. La description

de sa prestation n’est pas très flatteuse : « une pauvre chanteuse de romances nommée mademoiselle Favrichon ». Mais elle est à prendre avec précaution

car l’auteur se présente comme celui qui va apporter le bon goût culturel français

aux brésiliens et il n’est pas tendre avec ses compatriotes ! Plus sûrement, sa carrière n’a pas due être mémorable car c’est la seule information que j’ai trouvée sur elle.

Par contre, elle a trouvé l’amour au Brésil, elle y a épousé Manuel Olegario Abranches.

 

Jusqu’en 1868, aucune trace d’elle à Grandris, elle devait vivre au Brésil,

peut-être a-t-elle eu des enfants avec son mari malgré ses quarante ans… 

En 1868, elle est encore au Brésil, le couple habite au n°10 de la rue d’Alfandega

à St Sebastian de Rio de Janeiro, capitale de l’Empire du Brésil. Le 2 décembre 1868, ils achètent une maison à Grandris pour un montant de 9 000 francs.L’acte

est rédigé par Me Granger, notaire à Lamure-sur-Azergues. Le représentant du couple Abranches chez le notaire est M. Claude Clavelloux, prêtre curé de Grandris.

En annexe de l’acte de vente figure une procuration en portugais, rédigée

par un notaire de Rio et sa traduction en français.


Dans son testament olographe (écrit de la main du testateur, NDR), rédigé

le 26 août 1872, Claudine Favrichon lègue à la commune de Grandris la maison achetée par le couple en 1868 qu’elle destine à la fondation d’un hôpital.

C’est en 1879, par un décret du 6 août du ministre de l’intérieur pour le président

de la république, que la commune est autorisée à accepter le legs. Le décret parle

des consentements de ses héritiers naturels, son mari et peut-être ses enfants,

faits les 1 et 21 septembre 1877 et 19 octobre 1877. Le 31 août 1878, la maison

est estimée à 7000 francs.

Toujours par testament, elle lègue 1 000 francs à la commune pour achever les travaux de l’école du hameau de Gondras, 5 000 francs à la Congrégation des Sœurs

de l’Adoration Perpétuelle du Sacré Cœur de Jésus (basée à Lyon mais possédant

un établissement de quelques sœurs à Grandris) et 2 000 francs à la fabrique

de Grandris (une moitié pour la célébration de 100 messes, une autre à distribuer

aux pauvres de la paroisse).

 

Ce legs est un élément fondateur de la création de l’hôpital de Grandris.

C’est dans sa maison que sont installés les six premiers lits de l’hospice, autorisés

par décret du Président Jules Grévy en 1882. Ils passent à 10 en 1887, puis à 60

en 1973. Aujourd’hui, l’établissement en compte 160. En 1882, l’hôpital a quitté

les murs de la maison de Claudine Favrichon mais c’est une autre histoire...

 

Aucune trace de son décès à Grandris, ni dans les alentours. Finalement, un peu dépitée, je suis allée faire un tour au cimetière du village…

où elle est enterrée avec sa maman.

Sur sa tombe est notée : « A la mémoire de ma très regrettée épouse Claudine Abranches née Favrichon

au hameau de Gondras le 24/09/1812 décédée à Paris le 1/04/1877 à l’âge

de 64 ans et 6 mois et 17 jours.

Elle repose à côté de sa bonne mère, désir accompli par son époux, le même tombeau les réunit. » Son mari

n’est pas enterré avec elle. Je n’ai pas trouvé son décès à Paris, peut-être

est-il reparti au Brésil…

 



 

A son retour en France, le couple Abranches vivait à Grandris, dans sa maison, et à Paris, 12 rue Blanche, où Claudine est décédée en 1877. Le bâtiment de l’époque a été remplacé par un grand immeuble des années 1910-1920. Si ses fenêtres donnaient côté rue, elle avait une vue directe sur l’Église de la Trinité. Elle a finalement passé très peu de temps de sa vie à Grandris, mais elle n’a oublié ni son village,

ni sa famille. Cécile Daniel.


Source :
Site de la BNF, gallica.fr
Archives départementales du Rhône
Archives privées de l’hôpital de Grandris Letra.